Elle fixait la bague qui ornait désormais son annulaire gauche. En or, un gros diamant l’ornant. Elle ne voulait même pas savoir combien cette horreur avait pu couter. Car, oui, à ses yeux, cette magnifique bague n’était qu’une horreur, laide en tout point, venant gâcher ses doigts fins. Elle n’en voulait pas. Mais, elle n’avait pas son mot à dire. Pas le choix. C’était à sa famille, son père de décider ce qui était bon pour elle. Quel homme deviendrait son époux. Oh bien-sûr, elle aurait pu crier, dire non. Elle en avait le droit, la femme était égale à l’homme. Logiquement. Mais, elle était fille unique d’une famille trop importante, trop riche, pour qu’elle épouse n’importe qui alors…elle n’avait pas son mot à dire. Elle soupira, fermant un instant les yeux. Comment faire ? Cet homme, son fiancé, elle n’en voulait pas. Il était bien trop âgé comparé à elle, bien trop laid à ses yeux. Trop gros, trop grand…trop tout. Se mordillant la lèvre, elle frissonna. Non. Impossible. Devait-elle laisser faire le temps ? Se marier et donner un enfant, un unique enfant pour ne plus jamais être touchée ? Touchée…rien que de penser que cet homme allait devoir la toucher lui donnait envie de vomir. Une horreur, il ne savait d’ailleurs surement pas s’y prendre !

Une unique larme glissa sur sa joue alors qu’elle se laissait tomber en arrière, son corps tombant sur le matelas moelleux de son lit, ses yeux fixant le plafond blanc. Que faire ? Que dire ? Peut-être pouvait-elle demander l’avis de ses amis ? Non. Elle ne voulait pas parler de ça. Elle préférait le cacher que dire à tout le monde qu’elle était fiancée. Fiancée. Ce mot sonnait tellement faux. Tellement laid. Elle n’arrivait pas à trouver de solution. Pas à trouver ce qu’elle pouvait faire pour éviter ce mariage arrangé. Pour dire non. Pour dire qu’elle était une femme libre et moderne qu’elle ne voulait pas de cet homme, qu’elle épouserait celui qu’elle aimait. Non, elle ne trouvait pas d’idée. Et pourtant cela faisait déjà quelques mois, deux, que cette bague ornait son doigt. Rendant fier son père. Elle le savait, elle le voyait, souriant à chaque fois que son regard tombait sur le diamant exorbitant.

Cher journal,
Je crois que j'ai enfin décidé quoi faire. Cela fait maintenant trois mois que je suis fiancée et, les préparatifs du mariage commencent à s'organiser beaucoup trop rapidement à mon goût. Alors...je crois que j'ai trouvé. Je vais...Peut-être ne vaut-il pas que je l'écrive ici. Je ne sais pas encore si je te garderais auprès de moi. Si tu auras ta place dans ma solution, mon idée. Oh bien-sûr, je pense que je suis folle. Complétement. Mais, j'ai essayé de lui en parler, à père, il n'a rien voulu entendre. Je le savais mais, j'avais espéré qu'il m'aime assez pour rompre ce contrat idiot et hors du temps.
Demain...j'irais là-bas, acheter ma solution puis, je prendrais cette boite qui se trouve sous mon matelas. Je sais qu'il n'y a pas grand-chose dedans. Mais, surement assez pour pouvoir survire quelque temps. Je pense. J'ai peur...horriblement peur. Mais, de cette vie je n'en veux pas. Alors, quel choix ai-je ? Me taire et pleurer ou prendre mon courage et... Je préfère le courage et la peur que les larmes.

La nuit était tombée depuis longtemps lorsqu'elle se glissa discrètement en dehors du domaine familial. Une valise à la main, son sac à main à l'épaule. Elle tremblait de tous ses membres alors qu'elle se glissait dans le taxi. Sans un mot. Elle ne pouvait se trahir. Dire ce qu'elle faisait, ou, où elle voulait aller. En fait, elle n'avait eu aucune idée de l'endroit où partir. Parce que son père allait lancer un avis de recherche, elle en était certaine. Alors, au final, elle avait tiré au sort. Étonnant, idiot peut-être mais, cela lui avait permis de trouver sa destination. Posant les yeux sur le paysage qui défilait autour d'elle, elle se revit retirer la bague de son doigt. La posant bien en évidence sur son bureau alors que son armoire s'était vidée de moitié, quelques-uns de ses livres préférés disparus. Pas un mot, rien. Elle n'avait pas eu le courage d'expliquer son geste. Mais, cette simple bague, répondrait à toutes les questions de son père, elle en était certaine.

La voiture s'arrêta, mille lumières venant remplacer la nuit noire alors qu'elle pouvait voir s'étendre au loin la piste de l'aéroport. Elle était folle. Un frisson d'excitation, de peur, glissa le long de son dos alors qu'elle s'éloignait du taxi, valise en main. Ses yeux cherchant sa destination, l'endroit où elle recommencerait sa vie. Enfin...cela allait être bien plus compliqué que cela...parce qu'elle allait être une immigrée. Elle s'était payée un visa oui, pour des vacances. Rien d'autre. Le temps passé, elle serait sans papier, sans réel droit d'être dans ce pays. Elle frissonna. Et si elle se faisait renvoyer de là-bas ? Et si elle n'arrivait pas à s'en sortir ? A trouver du travail ? A avoir une autorisation d'habiter sur ce territoire ? Elle n'eut pas le temps de se poser plus de questions qu'elle se trouvait déjà assise dans l'avion, son regard fixé sur le hublot, voyant sa ville natale, sa vie, s'éloigner, vite, trop vite. Avait-elle eu raison ? Elle n'en savait rien. Réellement. Mais...elle n'avait trouvé que cette solution. Fuir, loin. Pour vivre.

Cher journal,
Finalement je t'ai bien emmené avec moi et, j'ai eu raison. Parce que...-traces de larmes- je pense que j'ai eu tort. Tort de partir ainsi, pensant que tout se passerait bien. Car, ce n'est pas le cas. Oh, dans les premiers temps tout s'est bien passé. Mes économies m'ont permis de ternir quelques temps tout de même. Mais...l'argent est partie, l'hôtel devenu trop cher. Et...depuis, j'erre dans cette ville que je ne connais pas réellement. Mes papiers cachés au fond de mon sac. Mon visa expiré. Mais...mes cheveux sont sales, ma peau aussi. Je sens mauvais, j'ai faim. Je pense même que j'ai perdu du poids. Finalement...peut-être qu'un mariage aurait été mieux ? Non. Parce que...je ne sais pas si j'ai encore la force d'essayer de vivre. Je sais que si la police m'arrête, je ne serais pas en règle, je serais renvoyé là-bas. Et...ça me fait peur. Parce que même si je me traine dehors en tout temps. Je ne veux pas retourner là-bas. Mon père va me tuer, me marier de force, encore une fois. Je le sais. Parce que c'est pour le bien de notre nom, de notre famille. Même si, je l'ai trahi, souillé. Je ne...je ne sais pas comment faire pour me sortir de cette galère. Fuir pour tout changer. Bonne idée en pensée, mauvaise à vivre. En plus...je viens à me dire que le seul moyen de rester ici, c'est de me marier. Fuir un mariage pour en faire un autre ? Non. Impossible. Et pourtant, si je me trouvais un mari, j'aurais des papiers. Des vrais. Des papiers d'ici. De cette belle ville, de ce beau pays. Je suis épuisée. Épuisée...