« Je rêve !! Non non non non ! Aller change ! » J’ai l’air bien fine à gesticuler dans tous les sens assise sur le trône. Je le secoue énergiquement, puis regarde. Non toujours pas ça. Une nouvelle secousse mais toujours rien. Un cycle infernal qui dure depuis au moins dix bonne minutes. C’est impossible. Je ne veux pas y croire. C’est un cauchemar, c’est ça… Ou une caméra cachée ! Elle est où cette fichue caméra. Maintenant j’ai bien ris on change ! Et pourtant non. Ça ne change pas et c’est bien la réalité car c’est trop long pour être un cauchemar. Je retente ma chance une ultime fois, mais les lettres ne s’effacent pas. « Pregnant » Sept lettres qui signe mon entrée direct vers un enfer personnel. Sept lettres démoniaques qui brulent avec sadisme sous mes yeux dans ce petit tube blanc. Je balance ce dernier à travers la pièce et il part rejoindre ces deux autres frères dans la poubelle ou presque. Je m’en fou qu’il les rejoigne ou pas, ils sont tous des mini messages du diablotin cacher dans le placard qui a élu domicile là où il n’aurait pas dû ! Je passe mes doigts à travers les mèches blondes de ma tignasse. Je ressens l’envie irrésistible de me les arracher par touffes mais efface rapidement l’idée qui germe dans ma tête, quand mes doigts se prennent dans un nœud tenace. Je grimace et extirpe mes doigts et croise ces derniers sur mes genoux.

Que vais-je faire ? La journée touche presque à sa fin et ce dernier, fichu, diabolique test indique la même chose que les deux autres. Je ne veux toujours pas y croire alors me lève et attrape du bout des doigts ce dernier misérable tube dans l’espoir qu’il est changé d’avis, mais il est décidément très têtu et reste buté bien sur le moi « Pregnant ». Ma main se referme sur le tube maudit, tandis que je jure à mi-voix je commence à faire les cent pas. Comment ça a pu arriver ? Je sais comment c’est arriver mais pourquoi ? J’avais pris mes précautions et lui aussi... Hein lui aussi ? « BORDEL !! » Un cri sorti du cœur qui ne me fait même pas du bien ! Les pensées défilent si vite dans mon esprit que je me rends compte que je suis venue à une idée de solution radicale plus vite que jamais je ne l’aurais pensé. J’ai pensé au début à tout le contre, ce qui a été vite car tous les arguments sonnent en moi de manière très familiale. Evidemment, c’est les même que pour le mariage. Trop tôt. Trop jeune. Nouvelle maison. Prêt. Dettes. Boulot. Son roman. Et pourtant tous ces bons arguments sont balayé à la simple évocation de son prénom. « Noah. » Je le déteste autant que je l’aime à cet instant. J’allais devoir lui dire… Et si je… Ne pas lui dire. Lui cacher ? Un rendez-vous, une aiguille et… Non trop lâche. Une erreur absolue. Pas de mensonge entre nous. On se l’est juré. Je ne peux pas lui cacher, ça serait ignoble, égoïste. On a été deux à arriver là, on sera deux pour… De toute manière je déteste les hôpitaux je pourrais jamais le faire sans lui. Lui dire ? Il ne reste plus que ça. Quand je sors de la salle de bain je me sens porter tous les maux du monde avec cette histoire. Au bord des larmes je cours presque me jeter sous les couettes. J’attrape un oreiller et le sers contre moi en position de fœtus. Oui je suis encore une enfant effrayée, alors pourquoi il m’oblige à vivre ça maintenant… Je suis maudite… Maudite…

Le temps s’écoule doucement. Combien de temps il va me faire poireauter dans mon effroi ? Combien il va encore me laisser gérer ça, seule ? Je me relève finalement en position assise avec toujours l’oreiller dans mes bras et les genoux tout contre. J’allume la télévision et m’arrête sur une diffusion sur un épisode de Sex and the City et le regarde sans le regarder. La porte claque en bas, et les escaliers fraichement rénovés craque un peu sous un pas précipité. Je n’attends même pas qu’il arrive en haut des escaliers avant de balancer le premier oreiller d’une longue série. Et oui Kerwan Joyce-Hennessy tu t’es mis dans la merde, tu vas me le payer toi et ton popole !